Sarah Champoux – 2e année
Presque 60 ans après la première représentation de la pièce de théâtre Les Belles-sœurs de Michel Tremblay, le langage populaire au Québec est en constant changement. Dans une société où la maîtrise du français est fragile, la variété québécoise de la langue survit aux tempêtes depuis des années.
Le mot « joual », utilisé pour décrire le langage familier de l’époque, est devenu populaire durant les années 60. Cette expression provient de la déformation du mot « cheval ». « Parler joual, c’est parler comme parlent les chevaux, donc il y a une connotation très négative qui y est associée dès le départ », mentionne le sociolinguiste et professeur titulaire à l’Université de Sherbrooke, Wim Remysen.
Le français populaire dans l’art
En 1968, les Québécois faisaient connaissance avec la pièce à succès Les Belles-sœurs écrite par Michel Tremblay. Celle-ci se différenciait du répertoire habituel par sa langue provenant directement du milieu ouvrier. L’autrice et parolière Mélanie Noël affirme que le langage populaire des Belles-sœurs était nécessaire pour que les Québécois puissent décomplexer leur façon de parler.
Aujourd’hui, l’artiste confirme que l’idée de rester simple dans ses propos pour aller rejoindre le plus de gens possible est toujours présente. « Je veux vraiment que les gens ressentent ou vivent l’expérience, que le message passe directement au cœur sans passer par la tête, donc c’est sûr que je n’essaie pas de mettre de gros mots compliqués que personne n’utilise et dans lesquels personne ne va se reconnaître. »
Le français québécois d’aujourd’hui, comment va-t-il ?
Le rapport sur l’évolution de la situation linguistique au Québec publié en 2024 par l’Office québécois de la langue française mentionnait que la diminution de la part de la population parlant principalement français à la maison s’est poursuivie, passant de 81% en 2016 à 79% en 2021.
M. Remysen convient que le français au Québec vit des pressions. « Le contexte nord-américain fait en sorte qu’il y a une langue qui est tellement importante à l’échelle du continent. En plus, cette langue-là est dominante à l’échelle planétaire. Ce serait illogique de s’imaginer que ça n’a pas de conséquence sur l’utilisation de notre langue. » Cependant, le sociolinguiste tient à rappeler que les Québécois vivent dans une société où le français est solide.
Le professeur affirme qu’il n’y a pas de « vrai » français. Les débats autour de la valeur des variétés de langue se font toujours selon des raisons sociales ou culturelles, ce qui ne peut définir la valeur d’une façon de parler. « On ne peut pas dire qu’il y a une façon de s’exprimer meilleure qu’une autre, ça se passe dans notre tête. »